"Introduction à l'art de l'auto-stop : Pour arrêter les voitures, lever un doigt ! "Parce que c'est bien plus chouette de pédaler ensemble quelle que soit la direction" "L'amour, c'est comme les animaux, Monsieur, ça ne se dresse pas ça s'apprivoise"..."Les souvenirs, c'est comma la vieille moutarde si ça ne pique plus c'est que c'est périmé"...
C'est rue St Denis que j'ai croisé la première fois Madame il y a quelques mois sans savoir que je la reverrai, le minou qui est devenu, semble t-il, sa mascotte, m'ayant à l'époque un peu tapé dans l'oeil.
Depuis, j'ai trouvé d'autres citations et mes propres murs ont même fini par adopter ces conseils avisés. Des conseils, en tout genre donc, à suivre peut être pas, mais qui vous distingueront du commun des mortels et vous fera briller dans les dîners et autres petites sauteries (oops...). Madame est une sacrée bonne femme. Le verbe haut et piquant, le ciseau habile et le pinceau de colle qui ne l'est pas moins ; dans un cadavre exquis aussi littéraire que visuel, pratiqué en solitaire, Mademoiselle (pardon, Madame) s'essaye dans un succès qui ne fait que grandir, à distiller dans les rues de Paris des messages tel un corbeau à l'humour tant burlesque que potache et à mettre en scène tout un petit théâtre tiré tout droit des pages de vieux magazines dont les détails imbriqués dans un joyeux bric à brac bien pensé font surgir un monde imaginé par un esprit déluré. Ou comment faire du kitsch de bon goût et de bon ton....
Madame nous interpelle par ses billets doux mais aussi à coup de semonce de tête de chat et autres maquereaux bien frais (enfin, ça reste à vérifier), accompagnés parfois de donselles presque en chaleur malgré la froideur des murs contre lesquelles elles sont plaquées.
L'animalerie accompagne souvent les protagonistes, ainsi le chat (celui là même qui a déjà noircit quelques lignes de ce blog, ce félin des rues parisiennes, jungle de notre environnement urbain actuel) côtoie la poiscaille ici, un cheval de bois par là, ou bien encore un poulet roti qui trône sur le devant de la scène. Les artifices en tout genre sont autorisés, au gré de l'humeur de la fauteuse de trouble, pourvu qu'ils fassent plus sourire que réfléchir : perceuse, couronne tout est bon à prendre.... le maquillage est tout aussi fantaisiste : lunettes, étoiles (dans les mirettes ou ailleurs) et bien souvent pour tout le monde une ostensible moustache fine et élégante sur les protagonistes de l'affaire, cette même moustache qui signe invariablement et tout aussi ostensblement le délit, dans un rouge vermillon qui ne pourra qu'attirer l'oeil du promeneur.
Les mots doux sont chez Madame trempés dans une verve acidulée (pour ne pas dire acide) qui fait tout le charme de la chose. Grivois ? peut être, léger, sûrement, absurde et hétéroclite assurément, à l'image de la technique utilisée qui marie un peu tout et n'importe quoi dans une alchimie unique, propre à la sensibilité de l'artiste. Ainsi surgissent sur les murs de notre quotidien des effigies des années 30, 40 ou 50 échappées des grandes heures de Jours de France, Marie Claire, ou Match, Madame Figaro ou encore ELLE. Madame libère ainsi complètement non seulement les femmes de ces magazine figées dans leur époque mais aussi celles à qui ces bonnes pages étaient dédiées. Et même si la démarche de la paire de moustaches rouge n'est pas exactement celle là, c'est aussi comme cela que je l’interprète.
En tout cas cette désinvolture vive et alerte me plait bien et il semblerait que je ne sois pas la seule à apprécier ces scènettes légères, témoignage d'une poésie hirsute et joyeuse. Détournement de la banalité des mots de la presse pour en faire de bons (que dis-je d'excellents) mots fabriqués de bouts de papiers oubliés, à l'heure du tout numérique, la matière reprend tout à coup de la valeur.....
L'objectif de Madame ? Faire un grand pied de nez général, une langue tirée en permanence à tous les emmedeurs...mais pas n'importe comment, avec l'élégance subtile et le langage indirect qu'offre la créativité artistique...le vecteur privilégié pour faire passer tous les messages même les plus subversifs. Ah oui, mieux que mes mots, voyez donc les photos sur le site perso de la rigolote.
Une rose rouge,
Sauvagement cueillie,
Dans la lueur écarlate,
Du ciel illuminé
D’un soir d’été
Au coeur de la forêt,
Arrachée à la vie,
Cette rose rouge éclairée,
Par le rayon assombri,
Du soleil couchant
Cueillie par un éternel rêveur,
A la quête du mystère de la vie,
Cette rose rouge autre fois si belle,
N’est plus qu’un vieux débris
Mais son souvenir éclatant est éternel
Sa beauté rayonnante demeure toujours,
Dans nos pensées les plus belles,
Tel est de même pour l’amour,
Éternellement éternel,
Même brisé il demeure toujours.
Depuis le début de la campagne présidentielle, j'ai eu l'occasion de rencontrer Marianne à quelques points stratégique d'affluence parisienne. La première fois sur la place du Châtelet, au pied de la fontaine du Sphinx, déjà évoquée entre les lignes de ce blog, la seconde sur les palissades d'enceintes des travaux du jardin du forum des Halles. Un espace de choix pour notre allégorie républicaine qui prend quelques libertés ces derniers temps sous le crayon et le pinceau de Liox. C'est qu'elle a de l’humour la miss, faisant de notre grand messe politico médiatique présidentielle une parenthèse de choix pour une Marianne nationale à la cocarde et au bonnet phrygien un brin déjanté.
Ma dernière balade sur la petite reine m'a permise de faire la connaissance d'un joyeux drille que je n'avais jusqu'alors pas croisé à pied. Dans la rue Drouot, dans un angle d'immeuble de bureaux, j'ai vu surgir cette tête de toutou, mi-goguenarde, mi-amusée, un brin moqueuse, un peu railleuse....En tout cas, ostensiblement joyeuse... Cette petite incursion fait d'un bout de papier coloré, collé à un endroit bien en évidence m'a fait sourire.
Et comme il n'y a à priori rien de particulier à dire de plus sur cette interprétation singulière d'un spécimen canidé, je laisse la place à quelques mots, plus littéraires que les miens, en l'occurence ceux de Baudelaire et vous faire ainsi partager sa propre vision de la gent canine, à travers "les bons chiens". Je ne sais pas dans quelle catégorie se situe celui que j'ai croisé dans mon quartier, sans doute que l'homme de lettre le trouverait quelque peu inclassable pour le coup !
Bien plus volontiers je m'adresserais à Sterne, et je lui dirais: "Descends du ciel, ou monte vers moi des champs Elyséens, pour m'inspirer en faveur des bons chiens, des pauvres chiens, un chant digne de toi, sentimental farceur, farceur incomparable! Reviens à califourchon sur ce fameux âne qui t'accompagne toujours dans la mémoire de la postérité; et surtout que cet âne n'oublie pas de porter, délicatement suspendu entre ses lèvres, son immortel macaron!"
Arrière la muse académique! Je n'ai que faire de cette vieille bégueule. J'invoque la muse familière, la citadine, la vivante, pour qu'elle m'aide à chanter les bons chiens, les pauvres chiens, les chiens crottés, ceux-là que chacun écarte, comme pestiférés et pouilleux, excepté le pauvre dont ils sont les associés, et le poète qui les regarde d'un oeil fraternel.
Fi du chien bellâtre, de ce fat quadrupède, danois, king-charles, carlin ou gredin, si enchanté de lui-même qu'il s'élance indiscrètement dans les jambes ou sur les genoux du visiteur, comme s'il était sûr de plaire, turbulent comme un enfant, sot comme une lorette, quelquefois hargneux et insolent comme un domestique! Fi surtout de ces serpents à quatre pattes, frissonnants et désoeuvrés, qu'on nomme levrettes, et qui ne logent même pas dans leur museau pointu assez de flair pour suivre la piste d'un ami, ni dans leur tête aplatie assez d'intelligence pour jouer au domino!
A la niche, tous ces fatigants parasites!
Qu'ils retournent à leur niche soyeuse et capitonnée! Je chante le chien crotté, le chien pauvre, le chien sans domicile, le chien flâneur, le chien saltimbanque, le chien dont l'instinct, comme celui du pauvre, du bohémien et de l'histrion, est merveilleusement aiguillonné par la nécessité, cette si bonne mère, cette vraie patronne des intelligences!
Je chante les chiens calamiteux, soit ceux qui errent, solitaires, dans les ravines sinueuses des immenses villes, soit ceux qui ont dit à l'homme abandonné, avec des yeux clignotants et spirituels "Prends-moi avec toi, et de nos deux misères nous ferons peut-être une espèce de bonheur!"
"Où vont les chiens?" disait autrefois Nestor Roqueplan dans un immortel feuilleton qu'il a sans doute oublié, et dont moi seul, et Sainte-Beuve peut-être, nous nous souvenons encore aujourd'hui.
Où vont les chiens, dites-vous, hommes peu attentifs? Ils vont à leurs affaires.
Rendez-vous d'affaires, rendez-vous d'amour. A travers la brume, à travers la neige, à travers la crotte, sous la canicule mordante, sous la pluie ruisselante, ils vont, ils viennent, ils trottent, ils passent sous les voitures, excités par les puces, la passion, le besoin ou le devoir. Comme nous, ils se sont levés de bon matin, et ils cherchent leur vie ou courent à leurs plaisirs.
Il y en a qui couchent dans une ruine de la banlieue et qui viennent, chaque jour, à heure fixe, réclamer la sportule à la porte d'une cuisine du Palais-Royal; d'autres qui accourent, par troupes, de plus de cinq lieues, pour partager le repas que leur a préparé la charité de certaines pucelles sexagénaires, dont le coeur inoccupé s'est donné aux bêtes, parce que les hommes imbéciles n'en veulent plus.
D'autres qui, comme des nègres marrons, affolés d'amour, quittent, à de certains jours, leur département pour venir à la ville, gambader pendant une heure autour d'une belle chienne, un peu négligée dans sa toilette, mais fière et reconnaissante.
Et ils sont tous très exacts, sans carnets, sans notes et sans portefeuilles.
Connaissez-vous la paresseuse Belgique, et avez-vous admiré comme moi tous ces chiens vigoureux attelés à la charrette du boucher, de la laitière ou du boulanger, et qui témoignent, par leurs aboiements triomphants, du plaisir orgueilleux qu'ils éprouvent à rivaliser avec les chevaux?
En voici deux qui appartiennent à un ordre encore plus civilisé! Permettez-moi de vous introduire dans la chambre du saltimbanque absent. Un lit, en bois peint, sans rideaux, des couvertures traînantes et souillées de punaises, deux chaises de paille, un poêle de fonte, un ou deux instruments de musique détraqués. Oh! le triste mobilier! Mais regardez, je vous prie, ces deux personnages intelligents, habillés de vêtements à la fois éraillés et somptueux, coiffés comme des troubadours ou des militaires, qui surveillent, avec une attention de sorciers, l'oeuvre sans nomqui mitonne sur le poêle allumé, et au centre de laquelle une longue cuiller se dresse, plantée comme un de ces mâts aériens qui annoncent que la maçonnerie est achevée.
N'est-il pas juste que de si zélés comédiens ne se mettent pas en route sans avoir lesté leur estomac d'une soupe puissante et solide? Et ne pardonnerez-vous pas un peu de sensualité à ces pauvres diables qui ont à affronter tout le jour l'indifférence du public et les injustices d'un directeur qui se fait la grosse part et mange à lui seul plus de soupe que quatre comédiens?
Que de fois j'ai contemplé, souriant et attendri, tous ces philosophes à quatre pattes, esclaves complaisants, soumis ou dévoués, que le dictionnaire républicain pourrait aussi bien qualifier d'officieux, si la république, trop occupée du bonheur des hommes, avait le temps de ménager l'honneur des chiens!
Et que de fois j'ai pensé qu'il y avait peut-être quelque part (qui sait, après tout?), pour récompenser tant de courage, tant de patience et de labeur, un paradis spécial pour les bons chiens, les pauvres chiens, les chiens crottés et désolés. Swedenborg affirme bien qu'il y en a un pour les Turcs et un pour les Hollandais!
Les bergers de Virgile et de Théocrite attendaient, pour prix de leurs chants alternés, un bon fromage, une flûte du meilleur faiseur, ou une chèvre aux mamelles gonflées. Le poète qui a chanté les pauvres chiens a reçu pour récompense un beau gilet, d'une couleur, à la fois riche et fanée, qui fait penser aux soleils d'automne, à la beauté des femmes mûres et aux étés de la Saint-Martin.
Aucun de ceux qui étaient présents dans la taverne de la rue Villa-Hermosa n'oubliera avec quelle pétulance le peintre s'est dépouillé de son gilet en faveur du poète, tant il a bien compris qu'il était bon et honnête de chanter les pauvres chiens.
Tel un magnifique tyran italien, du bon temps, offrait au divin Arétin soit une dague enrichie de pierreries, soit un manteau de cour, en échange d'un précieux sonnet ou d'un curieux poème satirique.
Et toutes les fois que le poète endosse le gilet du peintre, il est contraint de penser aux bons chiens, aux chiens philosophes, aux étés de la Saint-Martin et à la beauté des femmes très mûres".
Comment ne pas faire en ce mercredi "street art" un clin d'oeil à notre actualité politique nationale ? C'est bel et bien d'une affiche électorale originale, qui m'a d'emblée fait sortir mon appareil photo, dont il s'agira ici ce soir, affiche qui me permet par la même occasion de faire un petit laïus civique qui a toujours son importance à chaque de scrutin.
Aux côtés des candidats de tout bord, une figure (qui pourrait bien devenir emblématique sur les murs de Paris...) apparait sur le panneau 0....Le candidat Roman Kay !
C'est par l'image d'un triptyque que j'entame ce nouvel article street art. Cela faisait d'ailleurs quelques temps que je n'avais pas fait courir mes doigts sur le clavier pour évoquer les rues parisiennes parées de couleurs, de papiers collés reflétant toujours un ensemble de sensibilités enchevêtrées dans un flot de messages plus ou moins lisibles, mais surtout plus ou moins vus et appréciés.
Un triptyque donc....un
Peut être aurez vous deviné si vous avez déjà parcouru mon premier article (mais aussi le second) qu’il s’agit pour la troisième fois de celui que j'ai surnommé le "Chevalier de Cœur" qui poursuit encore et toujours sa croisade, ici en plein Paris mais aussi un peu (et parfois même beaucoup) plus loin... Un troisième opus donc qui constitue ainsi avec les deux premiers, un vrai triptyque, à l'mage de celui qui devrait sans doute bientôt orner mes murs.
Si sur mes cimaises personnelles les dessins de Fred le Chevalier continuent de s'aligner, celles de la rue, les cimaises "publiques", ne sont pas non plus en reste cher lecteur, car depuis mon dernier entrefilet, l'artiste a encore approfondi son sujet, perfectionné son trait, et ainsi sévi à coup de petits cœurs rouges et de regards impassibles, apportant par la présence de ce microcosme qui tourne au cœur de notre propre petit monde parisien souvent gris et anonyme, un peu de fantaisie et de rêverie.
Depuis mes premiers clichés affichant un dessin encore réservé, des personnages parfois un peu trop perdus dans des escaliers et des murs souvent esseulés, le "Chevalier de Coeur" a franchi quelques étapes et gagné de nombreuses batailles urbaines. La conquête des murs, certes, au fil des semaines puis des mois de pérégrinations faites de coloriages, de découpages et de collages, mais aussi la conquête des parisiens. Car à force de rouleaux de papier, de coups de pinceaux et de mots sibyllins il a apprivoisé tous les quartiers mais surtout charmé le coeur de leurs habitants.
Presque surpris de son succès (que j’avais pourtant un peu pressenti…), le Chevalier continue de dessiner, de coller, d'arpenter et de poursuivre son chemin tapissé de petits et grands (voire très grands) papiers découpés, vouant à la rue plus de considération qu'aux galeries qui ouvrent désormais leurs portes au dessinateur discret.
Car depuis mon deuxième tome j'ai finalement croisé l'auteur de ces incursions dessinatoires. Oh non, pas pour un de ces interrogatoires journalistiques dont il n’est pas vraiment féru mais pour une simple rencontre amicale et artistique. J’ai ainsi fait la connaissance d’une vraie sensibilité intérieure aussi joyeuse qu'originale et volubile, que cachent avec pudeur une réserve et une retenue naturelles. Une grande générosité qui m'a permit de comprendre un peu mieux le petit monde en noir et blanc qui se déroule tous les jours sous nos yeux.
Un totem qui trône maintenant sur mon bureau, quelques sérigraphies et une poignée de badges plus loin, un fichier de photos numériques qui s'épaissit encore et toujours et me voilà encore à vous conter les aventures de ces bouts de papier à la vie bien brève pour certains mais pour d'autres beaucoup plus longues.
Les amoureux se tiennent toujours par la main, regardent vers le même destin, se fondent dans un baiser ou dans une osmose qui n'appartiennent décidément qu'à eux ; veaux, vaches, cochons, loups et tout ce qui peut s'apparenter au monde animal ou son dérivé surnaturel viennent ponctuer la vie de ces êtres en pleine quête...De quoi d'ailleurs ? Peut-être tout simplement de rien !.....ou bien si, de ce que vous souhaitez, car à chaque dessin, l'interprétation que chacune de nos sensibilité veut bien lui attribuer. Là où certains verront une fillette portant un foulard sur la bouche, imitant la tenue d'un cow-boy, d'autres verront un bâillon ou un pseudo signe religieux. Bref, ces collages sont source d’imagination pour chacun de nos regards, chacune de nos références personnelles.
Il en va de même pour le monde des "totems" personnalisant bien souvent les rencontres et les amitiés du Chevalier, au gré de ses références diverses et variées.
Créant ainsi sa propre mythologie née d'une inspiration littéraire, musicale et artistique multiple, l'artiste use d'une iconographie qui lui est véritablement propre, où les symboles s'entremêlent avec les actions et où le phrasé se traduit aussi bien par le trait de crayon que par les mots qui quelques fois les complètent, se suivant dans l'ordre poétique, un brin absurde même, que leur auteur a bien voulu leur donner. Message subliminal pour certains, limpidité pour l’esprit créatif qui les composé, maximes, dictons, proverbes, pensées, sentences et autres citations, ces mots doux accompagnent les arabesques formant ainsi un ensemble dans une cohérence aussi incompréhensible qu’évidente. A la croisée des chemins parisiens, les mots viennent alors souligner dans un halo de courbes et de volutes l'esprit en perpétuelle quête d'un autre univers qu'il souhaiterait rapprocher du notre....
Si la récurrente du cœur rouge est toujours là il y a encore eu bien des évolutions ces derniers mois dans les carnets de croquis de celui qui semble derrière son oeil vif et rêveur à la fois toujours partagé entre le monde qui le garde sur terre et celui, qui tourne presque un peu à l'envers, un peu plus haut vers les étoiles. A l'image de ces personnages dotés de jambes de bois et de ces chats qui portent ici et là costards et cravates venant, pourquoi pas, nous indiquer que nous nous comportons peut être un peu parfois comme des animaux, pas si évolués que cela...
Les premiers dessins qui ne mettaient souvent en scène qu'un ou deux personnages ont laissé place dans certains cas à de véritables scénettes où le papier est entièrement recouvert de ce trait invariablement précis, sûr mais si léger que, quand bien même une page entière serait noircie, elle resterait aérée et agréablement agencée....
Et puis, les petits bonhommes ont muté, admirablement grandi, comme dopés à une hormone artistique surnaturelle, à l'instar de ce couple qui a traversé en courant la cour du centre Pompidou, juchés sur ces désormais insignifiants mais gigantesques tuyaux blancs, qui il y a quelques décennies faisaient pousser des cris d'orfraie aux bien pensants parisiens à l'âme un peu trop conservatrice. Un esprit que l'artiste ne s'est pas fait sien. Non, toujours en avant, en recherche, marchant, que dis je, courant sur les chemins de la poésie, sur les allées d'un monde imaginaire où il fleure bon les sentiments heureux, la sérénité ponctuée néanmoins de cette inamovible réserve qui se lit toujours autant sur les visages de ces personnages à l’apparence bien sage… A l’image de leur créateur ? (le point d’interrogation ne me semble pas de trop…). Enfin, là où la signature avait du mal à apparaître dans les premiers collages, le pseudonyme a pris toute sa place, souvent sur cette banderole à l'esprit troubadour, comme si l'artiste assumait enfin au grand jour tout son talent.
La surface du support utilisé, le papier, rend l'ensemble du dessin encore plus lisse et accentue encore le sentiment de pureté et de dépouillement renforcé par le choix de laisser la plupart du temps le blanc s'opposer au noir. Un support graphique sans aspérité qui vient épouser celle des murs qui eux, en ont vu et en connaitront bien d'autres....Mais c'est bien quand l'œuvre est apposée dans la rue, qu'elle prend la patine du temps à coup d'averses parisiennes, de graffitis en tout genre, qu'elle s’effiloche au gré du vent comme de la bêtise des passants, qu'elle prend ainsi sa véritable étoffe, sa personnalité et vit enfin sa propre histoire loin du bureau, des crayons et des ciseaux du dessinateur.
Et puis, il n'y a pas que l'espace de la rue...quand l'artiste franchit le pas d'une galerie et que les cimaises à ciel couvert remplacent, même ponctuellement, celles qui s'offrent à ciel ouvert au passant de tout poil, c'est que le dit artiste se voit conféré une reconnaissance du monde du marché de l'art et par là même des intérêts économiques divers et variés, prenant ainsi (un peu faussement parfois) le pas sur l'intérêt artistique mais surtout humaniste qui reste intrinsèque à l'esprit et à la démarche pure et simple du street art.
C'est d'ailleurs pour ces raisons que je préfère aller à la rencontre du "Chevalier de Coeur" là où je sais qu'il se sent le mieux, c'est à dire dans la rue, quand bien même les endroits sont parfois gris et sales, là où ses dessins sont bien au jour et à la vue de tous, à l'image de ce petit homme de la rue du Temple vêtu de son manteau d'hiver et coiffé d'une paire de cornes, se détachant sur ce mur jaune patiné par les passages multiples des artistes offrant à cette cimaise urbaine utilisée à qui mieux mieux un supplément d'âme et à ce collage venant ainsi apporter sa voix à cet art "participatif", un caractère particulier.
La rencontre de cet art furtif et passager est bien plus belle dans la solitude d'une rue que je connais pourtant bien, l'animation d'un quartier que j'apprécie, un lieu de passage qui m'est familier et qui me l'est encore plus par la présence devenu coutumière de cette famille et de cette faune parfois étrange (toutefois sans jamais être véritablement étrangère) depuis que je cherche, je croise, je traque parfois, ces bouts de papier collés je le sais, avec joie et humour, philanthropie et dérision, mais surtout avec cette sensibilité et cette générosité aussi pudique qu’authentique.
Alors oui je le reconnais, je suis dithyrambique dès que je parle du "Chevalier de Cœur" ; oui, mon lyrisme va un peu à contresens de la simplicité du trait et de la mise en scène dépouillée qui caractérisent les œuvres de notre ami, mais qu'importe, cet article est tout d'abord un remerciement pour celui qui fait naître un sourire sur mes lèvres à chaque fois que je croise un de ses dessins dans la rue, invariablement dans le Marais, souvent dans les dédales du cœur de Pigalle, ou encore dans une rue inattendue, créant ainsi une heureuse surprise.
D'aucuns diront
Un grand merci donc pour Monsieur Fred le Chevalier de continuer malgré ce succès ascendant, croissant et qui ne se dément décidément pas, de faire de mon Paris de coeur, la plus belle des galeries (et un grand merci à tous les lecteurs qui seront allés jusqu'au bas de ce long billet !).
On parle quelque fois de la Nouvelle Eve, certains évoquent "l'homme nouveau" en parlant de cette nouvelle génération de la gent masculine (censée entre autre avoir un comportement plus en phase avec la gent féminine...), on parle de Mars et de Vénus comme de planètes d'où viendraient respectivement les hommes et les femmes....Et bien moi ce soir, je vais vous parler brièvement du nouveau Cupidon....A priori rien de tel pour réconcilier (s'il était nécessaire) les deux parties de l'Humanité qui s'évertuent bien souvent à ne rien comprendre à celle opposée à la sienne.....
Au coeur de Paris, dans mon Paris de coeur, j'ai quelques fois croisé une bien étrange apparition, tel un ange sur les vieux murs de la capitale s'affiche le doux profil d'un enfant, fille ou garçon, un fantôme parisien aux ailes aussi aériennes qu'elles sont éphémères puisque dessinées à la craie. Tel un portrait comme aimait les réaliser Cocteau, ce visage léger et évanescent m'a bien souvent intriguée.
"Voici ce qu'un ange m'a dit
Un jour où je me promenais dans la rue
Ne croyant plus en rien
Qu'en la pauvre misère du monde
Ma ville est le paradis de l'anonymat et de l'ennui
Et à toi seulement je le dis
Que si c'était de moi je partirais d'ici
Ma ville est le paradis des anges perdus, sombrés dans l'oubli
Mais je sais que tu ne crois pas
T'as jamais reconnu le son de ma voix
Demain on verra
Si tu ne m'as pas oubliée
Puisque sans toi, je n'suis personne
Demain on verra
Combien de temps tu pourras rester
Seule sans jamais aimer personne
Ma ville est le paradis de tous ces rêveurs
Qui ne dorment pas la nuit
Je la vois dans toutes ses illusions
Je suis parmi ces gens qui n'ont pas de nom
Demain on verra
Si tu m'as encore oublié
Puisqu'avec toi, je ne suis personne
Demain on verra
La solitude dans un café
Pleurant de n'avoir aimé personne
Qui viendra me sauver moi
Je voudrais être comme toi
Dis-moi, qui viendra me sauver moi
Je voudrais être comme toi
Dis-moi, pourquoi, les hommes
Ne voient pas les anges
Demain on verra".
Cela fait bien longtemps maintenant qu'au cours de mes différentes promenades parisiennes je croise parfois, telle une bonne étoile sur mon chemin (?) enfin plutôt sur certains murs de la capitale, la représentation, stylisée mais néanmoins bien scintillante, d'une pointe de diamant. Un petit bijou de poésie urbaine, quelques centimètres carrés de lumière et de finesse (dans un monde de brutes ajouteront certains...).
Un des premiers saisi sur le vif par mon appareil est celui placé juste à gauche de la grande fresque de Jef Aérosol sur la place Stavinsky ; plus récemment un autre a été vu sur le long boulevard de la Chapelle, au dessus de la gare de l'Est. Mais la dernière rencontre que j'ai faite avec ce qui s'apparente être le 100ème exemplaire de ces pierres taillées s'est faite dans mon quartier, dimanche dernier. Cette apparition sous le soleil de novembre m'a séduite et m'a finalement décidée à rédiger cet entrefilet...
Pour clore en poésie, voici quelques vers de Théophile Gautier qui éovque une autre histoire d'amour mais dont la préciosité s'accorde avec les "diamants de Paris".
"Tout amoureux, de sa maîtresse,
Sur son coeur ou dans son tiroir,
Possède un gage qu'il caresse
Aux jours de regret ou d'espoir.
L'un d'une chevelure noire,
Par un sourire encouragé,
A pris une boucle que moire
Un reflet bleu d'aile de geai.
L'autre a, sur un cou blanc qui ploie,
Coupé par derrière un flocon
Retors et fin comme la soie
Que l'on dévide du cocon.
Un troisième, au fond d'une boîte,
Reliquaire du souvenir,
Cache un gant blanc, de forme étroite,
Où nulle main ne peut tenir.
Cet autre, pour s'en faire un charme,
Dans un sachet, d'un chiffre orné,
Coud des violettes de Parme,
Frais cadeau qu'on reprend fané.
Celui-ci baise la pantoufle
Que Cendrillon perdit un soir ;
Et celui-ci conserve un souffle
Dans la barbe d'un masque noir.
Moi, je n'ai ni boucle lustrée,
Ni gant, ni bouquet, ni soulier,
Mais je garde, empreinte adorée
Une larme sur un papier :
Pure rosée, unique goutte,
D'un ciel d'azur tombée un jour,
Joyau sans prix, perle dissoute
Dans la coupe de mon amour !
Et, pour moi, cette obscure tache
Reluit comme un écrin d'Ophyr,
Et du vélin bleu se détache,
Diamant éclos d'un saphir.
Cette larme, qui fait ma joie,
Roula, trésor inespéré,
Sur un de mes vers qu'elle noie,
D'un oeil qui n'a jamais pleuré !"
Théophile GAUTIER - "Diamant du coeur"
Des chats, des chats et encore des chats...décidément ce félin des villes est bien partout dans la capitale...au printemps dernier, j'avais déjà repéré rue Quincampoix cet animal tracé d'une main aussi agile que coquine (un peu à l'image du matou finalement), que j'avais instinctivement baptisé "Street art minou"....(oui, je reconnais je suis plutôt bon public...), ce clin d'oeil un brin farfelu tout droit sorti d'un imaginaire espiègle m'avait bien séduite, un image positive qui fait spontanément sourire et qui laisse un brin admiratif devant ce faciès vecteur de sentiments et d'émotion fait pour autant d'un simple trait...
"C'est un art délicat, que d'appeler son chat :
Le baptiser n'est pas un simple passe-temps.
Je ne travaille pas du chapeau, croyez-moi,
Mais sachez-le, un chat a trois noms différents.
Un chat a, tout d'abord, son nom de tous les jours,
Comme Pierre ou Jean-Paul, Aglaë, Pompadour,
Comme sylvain ou Luc, Chat-fouuré, Cyprien...
Tous sont des noms sérieux, pour chats bien de chez nous.
Mais un chat a besoin, il faut que ça se sache,
D'un vrai nom personnel, un nom plus majestueux.
Sans ce nom, il ne peut pas redresser sa queue,
Affirmer sa fierté, hérisser ses moustaches.
Des noms de cette sorte, en veux-tu, en voilà,
Comme Méta-Mhétyl. Ouitchi, Kalikola...
Mais par-dessus tout ça, il reste encore un nom,
C'est le nom que jamais nul ne peut deviner,
C'est le nom dont jamais nul ne saura le nom,
le chat qui le connait ne veut le révéler"...
Thomas Stearns Eliot - "Comment appeler son chat"
C215, non ce n'est pas le nom du dernier modèle d'une marque automobile, ni un login de site internet, mais simplement le patronyme artistique (original certes), choisi par M.Christian G (je ne dévoilerai rien de plus afin de respecter
La première fois que j'ai croisé C215, enfin une de ses réalisation pas l’artiste
Cette petite fille au regard pensif et au visage légèrement penché m'a, sans doute comme d'autres parisiens tout de suite interpellée. Comment en effet, ignorer en cette apparition aussi douce que colorée, toute l'humanité de la démarche artistique proposée par C 215 ?
Car C215 est avant tout un portraitiste. Toute la profondeur de son oeuvre réside dans cette capacité à retranscrire au regard du spectateur, plus qu'une image mais bien une sensibilité, un caractère, l'âme même du sujet représenté et ce, dans des postures spontanées, naturelles, rendues à travers des angles de vue véritablement originaux apportant encore un peu plus de force à l'ensemble de la composition.
Fresque. C'est le terme qui me vient spontanément à l'esprit. Il me semble que c'est à travers la technique de C 215 que le pochoir se rapproche le plus de ce procédé pictural qui a notamment illuminé les grandes heures de la Renaissance italienne. Cette première impression
Sur ce dernier point, on peut facilement avancer que M.215 ne reste pas froid au contact des supports métalliques qui peuvent s’offrir à lui et à sa bande de bombes. Si j'avais comparé il y à quelques mois Artiste Ouvrier à un orfèvre, je ne peux m'empêcher de rapprocher le travail de C215 de celui d'une dentellier, tant le tracé et le modelé est fin et précis.
Un graphisme poussé, recherché, complexe, qui met d'autant plus en valeur la dextérité de notre ami artiste et qui n'est pas sans rappeler l'univers de la bande dessinée qui a probablement marqué ses jeunes années (et peut être aussi les suivantes...) pour ensuite influencer sa recherche artistique et son travail pictural.
Le sujet ? L'homme ! enfin l'Humanité, dans ce qu'elle a de plus vrai, naturelle, spontanée, que ce soit dans les multiples portraits de fumeurs (de havanes ou autres gauloises...), ou bien à travers tous ces visages livrant des expressions aussi diverses que variées, prouvant encore la dextérité dans la technique employée.
Si le mot fresque me semble le plus approprié, celui d'humanité ne l'est pas moins. Car dans chacune des réalisations de C215 c'est une petite partie de l'humanité qui est retransmise à travers une sensibilité qui met en valeur chacun des visages représentés.
Ce sont nos contemporains qui sont le plus souvent mis à l'honneur, mais pas seulement puisque ce sont également des reproductions de tableaux anciens que l’on croise au détour d’un angle de rue et qui prouvent encore que l'humanité est bel et bien représentée dans toute sa profondeur. D'ailleurs, bien des portraits de sujets actuels m'évoquent dans l'utilisation de la lumière, du regard et de la couleur, des oeuvres du Caravage. Peintre, si je ne me trompe pas qui semble en effet avoir inspiré par notre ami C215, au regard de la célèbre représentation de la Minerve du maître italien.
Et ce monogramme, fait d'un cube dans lequel sont habilement, artistiquement et harmonieusement disposées ces trois chiffres et cette lettre, vient signer telle l’estampille d’un artisan, chacune des oeuvres, en guise de signe caractéristique, permettant s'il était nécessaire, de faire ressortir les travaux de C215 de ceux des pochoiristes et au sens plus large, des autres artistes urbains.
Ainsi, à mes yeux, « M. G » n'a rien à envier aux maîtres de la fresque (que ce soit au sens de la "fresca" italienne, comme au sens figuré, dépeignant une époque, une société), dont nous croisons les oeuvres dans les livres d'Histoire de l'Art. Car au delà de la prouesse technique permettant de rendre un visage si expressif à travers un simple pochoir, c'est un peu d'humanité qu'il redonne sur chaque support, dans chaque coin de rue, sur chaque façade qu'il vient colorer de ces jets de peinture à l'aérosol.
Merci, Monsieur C215, votre travail mérite vraiment d'être davantage connu. Aussi, par ces quelques lignes je tente, à mon niveau, de contribuer à l'élargissement de votre public. Mes propres clichés se battant en duel, je préfère vous inviter à visiter la galerie de photos Flickr de l’artiste…
Pour achever cet article, je laisse les mots de Gérard Gautier (un autre Monsieur G....), expliciter à sa manière la portée du regard, chemin qui va de l'homme à l'homme, en quelque sorte un autre vecteur d'humanité et qui vient ici se coller aux regards laissés par les portraits de C215.
"Dans le regard de l’Autre
Il y a les voyages à entreprendre
Les beautés du Monde à imaginer
Les énigmes à déchiffrer
Les différences à découvrir
Les richesses à échanger
La surprise à partager
L’indifférence à vaincre
L’innocence à conserver.
Dans le regard de l’Autre
Il y a l’effroi de l’horreur à effacer
L’angoisse du lendemain à bannir
L’intolérance à combattre
La confiance à redonner
Le mépris à ne pas accepter
Dans le regard de l’Autre
Il y a l’espoir d’être aimé
Le bonheur à créer
Derrière le regard de l’Autre
Il y a l’Autre à respecter".
Il y a quelques mois déjà, j'avais tenté d'expliciter ou tout au moins de mettre en lumière, le travail de Miss Lili Tonnerre, dont les bombes sculpturales s'affichaient sur les murs du second arrondissement. Dans les mêmes rues que ces demoiselles aux tenues et aux poses affriolantes, étaient également apposés les collages d'une artiste, dont je souhaitais ce soir évoquer rapidement et poétiquement le travail....une artiste aux multiples talents, issue du même regroupement d'artistes que la Miss du Tonnerre, l'atelier 29, j'ai nommé Maycec (pour ne citer que son nom d'artiste et respecter ainsi sa véritable identité).
Robert Desnos sur le mur de l'église St Merri, Eugène Varlin au pied de Montmartre, telles sont deux figures que j'ai croisé récemment dans Paris, mais pas de n'importe quelle façon, par l'intermédiaire d'un artiste et plus précisément un mosaïste, bien discret, bien mystérieux, qui à l'image du Petit Poucet, dissémine ici et là quelques petits cailloux blancs...
"Cachez ce sein que je ne saurai voir".... Une réplique du Tartuffe de Molière pour faire de ce billet street art un billet littéraire ??? Non, non mais il s'agira tout de même malgré cette brève introduction aux inspirations lyriques caractéristique des comédies du grand siècle, d'une évocation de l'art urbain de notre siècle à nous....et dont l'expression graphique m'a immédiatement évoqué cette célèbre rétorque.
Vous aurez peut-être remarqué ce dessin récurent sur les murs de Paris, fait d'un trait dansant en quelques courbes et d'un point judicieusement placé...Une évocation néo érotique ? Je ne saurai dire.....Mais c'est comme cela que mon cerveau primaire l'a interprété... en effet, c'est ce que cette courbe coquine a spontanément fait naître en moi, en même temps qu'une réflexion aussi fragile que ce dessin, autour de l'expression libre urbaine faite d'un tout petit rien, tout comme ce trait courant autour de ce point suggestif.
"Pop, pop, pop musik..pop, pop, pop musik"...
Parlez-moi d'amour,
Redites-moi des choses tendres.
Votre beau discours,
Mon coeur n'est pas las de l'entendre.
Pourvu que toujours
Vous répétiez ces mots suprêmes:
"Je vous aime"....
Mais au fait, qui sont ces artistes au grand coeur qui font des rues de Paris une galerie à ciel ouvert ? Des altruistes forcément, des sensibilités en quête, non pas de gloire mais simplement d'une place dans le circuit artistique... Des rebelles un peu poètes ? De doux rêveurs ?... Peut être. Il faut bien être un peu de tout cela à la fois pour se livrer à une expression aussi libre qu'un brin sauvage puisque'elle reste pas tout à fait légale. D'ailleurs ce côté agitateur, amuseur et perturbateur public, intrigue souvent, interroge parfois, offusque (plus rarement, il me semble), mais suscite en tout cas bien souvent de l’intérêt (enfin, pour ceux qui prennent le temps de regarder). Ceux qui se servent des murs de la ville comme d'une cimaise ne semblent pas chercher la gloire, la postérité, la célébrité, la popularité, la reconnaissance et le gain. Un état d'esprit qui favorise nettement la sincérité, la spontanéité, et surtout, la liberté d’expression, et donc l'accueil et l'adhésion du public.
Et dans quelle démarche exercent ils leur talent ? Pour se faire petit à petit connaitre, permettre des débouchés éventuels ? par pur altruisme ? pour exprimer une recherche identitaire
Il me semble également que le street art soit voué à d'autres fins. En effet, il permet une diffusion, une démocratisation de l'art : ainsi laissé à la portée de tous, il s’offre gratuitement et permet même de dépasser toute sorte de clivages : Sociologiques, socio culturels il ouvre des sas entre les différents opérateurs du marché de l'art mais aussi du grand public. Il permet également une ouverture générale (par son accessibilité et la démocratisation qu'il sous entend naturellement) à l'art mais pas seulement. La société est certainement aujourd'hui beaucoup plus ouverte et plus réceptive à ces témoignages artistiques qui fleurissent sur les murs des rues qu'il y a une trentaine d'années à ses débuts à Paris. Un certain nivellement s'est peut être aussi opéré dans la sphère culturelle (probablement grâce aux pouvoirs publics qui ont favorisé ces dernières décennies un accès à la culture), permettant ainsi ce développement et cette ouverture du street art vers les institutions comme le marché, mais surtout vers le public.
Il représente de même un vecteur privilégié pour toute démarche engagée, intellectuelle....je pense ici inévitablement une nouvelle fois à Banksy, un peu aussi à Kouka et encore à d'autres, qui se servent du street art comme de vecteurs d'idées parfois politiques, en somme une sorte de porte drapeau ...C'est enfin un vecteur d'échange entre les hommes, vecteur d'idées, dialogues artistique entre les êtres, messages imagés : politiques, poétiques, personnels, engagés ou non, intentionnels ou non mais tous ont leur raison d'être : celle de faire des murs de la ville plus qu'un chevalet, des rues, plus qu'une galerie, et d'une ville plus qu'un "musée d'étrangetés".....Celle aussi d'exister pour faire sourire, interroger, parfois faire (un peu) réfléchir, ou tout simplement communiquer une certaine idée du beau, et parfois ce qui est un peu plus laid (mais je rentre là dans un peu trop de subjectivité...Je laisse à chacun le soin et surtout la liberté de se faire son propre jugement).
La diversité qui s'exprime en même temps dans une même universalité, laisse à penser que le street art permet de fondre dans le même creuset toutes les individualités de l'expression artistique, dans un même esprit, un même objectif : servir de vecteur au plus grand nombre. Par le biais de l'environnement urbain, l'art peut répondre facilement à toutes ses missions, et ce de façon tout à fait ouverte et beaucoup plus accessible tous. L'art urbain me semble donc être le chemin le plus court, le plus direct, le plus sincère, le plus spontané, le plus désintéressé pour remplir sa mission : celle d'étonner, d'interroger, d'émouvoir, de scandaliser parfois, de toucher, chacun d'entre nous qui arpentons chaque jour cette galerie à ciel ouvert, néophyte ou expert, pauvre ou riche, jeune ou plus âgé, pourvu qu'on ait un oeil et coeur un peu ouvert...
S'il me semble que la ville de Paris (sans chauvinisme aucun), se prête particulièrement bien à ce type d'expression artistique (le vent de la bohème parisienne serait il plus favorable à l'inspiration et à l'action de nos amis artistes urbains ?), il est en tout cas souhaitable que cette forme d'expression perdure, gagne en intensité et en qualité pour exacerber davantage encore la sensibilité du grand public, amenant celui ci vers d'autres formes et genre d'expression artistique, tout en permettant également aux artistes eux mêmes de profiter de ce tremplin (jamais limité par un plafond) tout en gardant leur fraîcheur et leur spontanéité de leur début dans la rue.
"In the mood for Street Art", "Street art reflexion", "Fashion sticking victim", "on the walls, the street art veritas"...voilà quelques items (à l'anglicisme exacerbé je le reconnais...) qui me sont spontanément venus à l'esprit dans la gestation de cet article, pour introduire, mais aussi qualifier cet entrefilet estampillé "street art" (donc), pas tout à fait comme les autres.
Au fil de ces billets du mercredi et de mes pérégrinations dans les rues parisiennes, à l’affût ici d'un dessin, là d'un collage, au hasard d'une image détournée, ou encore d'une peinture parfois un peu esseulée, mais aussi des albums photos disséminés sur la toile et les nombreux blogs qui lui sont à présent consacrés (et il y aurait aussi à dire sur ces contenus...), les expositions, les galeries qui en ont fait leur spécialité et qui semblent pousser presque comme des champignons...que j'ai réalisé à quel point l'expression artistique que l'on peut qualifier de "sauvage" au sens littéral du terme, avait pris toute sa place dans la capitale, sans que cela ne gêne plus personne, bien au contraire....Il m’apparaît que cet art urbain, autrefois si décrié et malmené, a aujourd'hui non seulement trouvé son public mais également son marché de l'art et vient presque à présent bifurquer vers les institutions culturelles.
Mais loin de moi l'idée de vouloir faire de cet article un essai, une critique ou un pamphlet, je laisse le soin aux ouvrages, de plus en plus nombreux sur le sujet, d'expliciter et d'avancer des théories sur l’histoire et le développement du street art dans notre société. Non, je souhaite simplement ici exposer quelques pistes de réflexions, étayées de quelques constatations.
Il est bien loin le temps où Blek le Rat et Miss Tic oeuvraient dans la nuit en cachette, en espérant ne pas voir fondre sur eux une patrouille de police...A présent, ce sont des "vernissages à ciel clair" (c'est à dire des collages, par exemple, réalisés au grand jour) quand ce n'est pas des happenings tout à fait encadrés (par des associations, comme le M.U.R, parfois même par les pouvoirs publics) et relayés par les moyens de communications actuels, qui sont organisés. Une quasi libération pour cet art, hier presque clandestin, aujourd'hui avalisé (quand ce n'est pas recherché), mettant en valeur cette forme d'expression artistique particulière, mais surtout spontanée, impromptue et improvisée, réalisée par une kyrielle de talents (plus ou moins affirmés, plus ou moins prometteurs...) et dont les oeuvres animent et font vivre nos rues, nos quartiers, le temps de quelques heures, de quelques jours (et bien souvent tout simplement le temps que l'on voudra bien leur laisser de vivre...). Oui, l'art urbain a aujourd'hui trouvé sa légitimité à travers cet engouement qui reste malgré tout récent, et que je serai presque tentée de qualifier depuis quelques années de..."tendance".
Si Miss Tic a depuis déjà quelques temps passé le pas de portes des galeries et si Jef Aérosol se retrouve en salle des ventes ou bien à oeuvrer en partenariat avec les pouvoirs publics (preuve en est, sa fresque "Chuuuuut" a fait grand bruit....sans jeu de mot aucun....), c'est qu'ils ont effectivement du talent, mais aussi que l'utilisation de l'espace urbain les a finalement permis de faire reconnaître aux yeux de tous la pertinence de leur démarche artistique et la subtilité de leur message.
Giorgio de Chirico ne disait il pas : "l'art, c'est de vivre le monde comme un immense musée d'étrangetés" ? Je vois en cette déclaration du peintre surréaliste, une belle explication de l'art urbain : faire de la rue ce grand musée d’étrangetés, miroir de l'âme de ses concepteurs et indirectement du monde qui les entoure, reflet d'un univers que nous créons nous mêmes et qu'il nous explicite à travers leurs sensibilités, diverses et variées.
"A chaque siècle son art, à l'art sa liberté"...comme le disait Gustave Klimt...quelle meilleure introduction que cette explication du grand peintre : A travers l'espace public que représente l'environnement urbain, l'art est libre de tout carcan, de toute contrainte, et prouve par le biais du street art, qu'il ne connait pas de frontière, de limite spatiale ou temporelle, qu'il fait fi de la notion de pérennité, de propriété et de postérité, du concept de reconnaissance, qu'il se moque de la notion économique de marché.
Accessible à tous et incessible, il s'offre à ceux qui voient en lui plus qu'un coup de pinceau, qu'un jet de peinture à la bombe, qu'un papier collé, sans rien demander en retour. Même si les années 1980 ont vu des artistes à la peine pour se faire accepter, le chemin a depuis été bien tracé....Il a trouvé sa place dans nos quartiers car il a largement trouvé son public et ainsi sa raison d'être et sa légitimité. Réalisé dans cette démarche, il dédaigne la notion d'intérêt, rendant ainsi la démarche de ces artistes d'autant plus personnelle, sincère et authentique.
A suivre...
Le jeux de mot du titre à lui seul introduit tout le sens (!) de ce billet....Avant de publier un prochain article qui sera probablementun peu plus étayé et plus recherché que celui de ce mercredi "street art", voilà un petit intermède qui reste néanmoins dans le sujet. "Il est interdit d'interdire !" Qui n'a pas retenu cette verte déclaration lancée il y a quelques 43 ans par des étudiants battant le pavé parisien et qui est entrée maintenant dans notre verbiage courant ? Et bien aujourd'hui il semblerait qu'elle inspire un petit agitateur urbain (pacifique bien sûr) qui s'amuse à faire des détournements, pas de fonds, mais de panneaux....de sens interdits.
Non nous sommes pas en face d'un monomaniaque de la bande blanche sur fond circulaire rouge, mais bien d'un amuseur qui s'évertue à insérer dans ces panneaux, qui font pester plus d'un automobiliste mais pourtant bien utiles dans la circulation parisienne, une silhouette noire transportant cette bande blanche....
Vous avez, parisiens, certainement déjà croisé un exemple de cette "attaque au sens interdit" qui sévit un peu partout dans Paris....Si vous l'avez remarqué, peut être avez vous comme moi immortalisé cette image inattendue, ou bien vous aurez pour le moins souri devant cette marque d'humour, certes un peu potache mais qui vous fait inévitablement penser en votre for intérieur...."c'est un peu idiot mais il fallait y penser"...
Certes l'idée est quelque peu saugrenue mais franchement amusante : finalement n'est ce pas là une image visant à illustrer la vindicte précitée ? Peut être bien, car sans ce rectangle blanc, le sens premier de ce panneau n'existe plus...donc plus d'interdiction. Cette gommette rouge dans la circulation urbaine n'a de "valeur" que si son rectangle blanc l'accompagne...Cette petite silhouette noire venant perturber le sens de lecture du code vient donc faire fi des interdits et invite à ne plus rien interdire....
Ainsi, grâce à un seul petit ajout, la question du rôle de la communication visuelle dans notre espace public du quotodien est elle soulevée. Je ne sais pas si notre "sens-interditophile" a une démarche intelectuelle ou artistique particulière, mais il semble en tout cas un tantinet hanté par la signalétique rouge et blanche parisienne.....Une invitation à braver l'interdit puisque le panneau, ainsi détourné, ne remplit plus sa mission première ? Une façon de voir et de considérer nos dogmes et nos codes (au sens large du terme), avec un peu plus de hauteur, de recul et de détachement ? peut-être...ou peut-être pas...Mais quelle que soit l'idée de ce contestaire urbain, on devrait se rappller de marier "il est interdit d'interdire", avec "la liberté des uns commence là ou s'arrête celle des autres"....
C'est donc sur ce dernier proverbe qui vise à apprendre à restreindre ses libertés en communauté et à mettre en garde contre tout abus de pouvoir, que s'achève cette chronique street art avant qu'elle ne devienne une dissertation de philospohie....