Sur une ligne de métro...

Sur une ligne de métro : "Tout va très bien Madame la Marquise"...

"Tout va très bien madame la marquise"....cette brève référence musicale à Ray Ventura me permet une petite introduction guillerette au reste de ce billet définitivement tourné vers une autre époque..non pas celle des barons, marquises et autres comtesses, mais celle d'Hector Guimard dont j'évoquerai ici l'une des célèbres réalisations, à savoir une station de métro parisienne....

Mais Pas n'importe laquelle (et sur les 300 stations il y a pourtant le choix....), mais j'évoquerai ce soir une station située en fin de course, en fin de ligne, lorsque l'on quitte l'effervescence du coeur de la capitale pour rejoindre la Place du Maréchal de Lattre de Tassigny. A la dernière station de la ligne 2, le métro s'arrête, vous obligeant à sortir de la torpeur et de la tiédeur pour rejoindre l'air libre. En ressortant, vous lever les yeux, certes sur le ciel souvent gris de Paris, mais aussi sur un étrange plafond de verre, vous réalisez alors que la bouche de métro de la station de la Porte de Dauphine n'est pas tout à fait comme les autres.P9100009.jpg
Elle ressemble par son originalité aux noctambules du Palais Royal...une comparaison qui fait sourire, car au début du XXème siècle, quand l'Art Nouveau porte bel et bien son nom, cette édifice devait être considéré par les usagers comme réellement extraordinaire, un accueil aussi partagé sans doute que celui réservé aux "Noctambules" de la Place Colette en 2000, que personnellement, j’affectionne tout particulièrement.....Alors remontons le temps.....
C'est sur concours qu'Hector Guimard se voit attribuer ce chantier pharaonique de l'édification des entrées du métropolitain. Différents projets sont proposés mais rejetés et ce sont finalement les arabesques désinvoltes de l'architecte qui sont retenues par la compagnie du chemin de fer. Fondée en 1899 c'est elle qui pose les premières pierres de ce chantier permettant à la capitale de rentrer définitivement dans l'ère moderne en même temps que de changer de siècle. 
C'est ainsi que 112 entourages d'accès de stations seront construits entre 1900 et 1912, dont celle évoquée aujourd'hui à travers ce billet, par le chorégraphe de la ligne et de la courbe architecturale. C'est en effet comme cela que je définirai Hector Guimard, dont je serais nécessairement appelée à reparler dans différentes catégories de billets, tant cet architecte a laissé son empreinte dans la capitale.
 
Son inventivité et sa créativité dans ce chantier du métropolitain se sont notamment exprimées à travers deux types d'entrées de stations, appelées plus techniquement "édicules", se déclinant chacun en deux versions, ouverte ou fermée sur les côtés : Le modèle dit, alphabétiquement "A", présentant un escalier abrité par un auvent et une marquise de verre, soutenue par quatre piliers en coin, comme on peut encore le voir à l'une des entrées de la station Abesses. Le modèle dit, non moins alphabétiquement et logiquement "B", a quant à lui des formes arrondies et la verrière est soutenue par trois piliers : deux à l'avant et un en arrière, à l'image de notre station de la Porte Dauphine (mais aussi comme à l'une des entrées de la station Châtelet).
Cet aspect lui  valut le doux surnom de "Libellule"...un sobriquet bucolique pour une innovation citadine mais qui correspond totalement à l'esprit de l'Art Nouveau axé sur la faune et la flore. Cette libellule architecturale a pris le titre vénérable de Monument historique le 29 mai 1978.
Dans ce cadre de verdure, si près de la longue avenue Foch et déjà presque un peu à l'écart de l'ébullition de la capitale, cette bouche de station de métro, telle un ovni, détonne. Comme les ailes de la libellule qui laisse filtrer la lumière, la verrière arrondie de la marquise apporte une douce luminosité dans la cage d'escalier de la station, dans laquelle on peut encore admirer les panneaux de lave émaillée d'origine. 
Là, le décor est typique de l'art nouveau avec ces arabesques, ces moulures aux mouvements nerveux investissant tout les supports utilisés et puis surtout cette couleur symbolique verdâtre, que l'on retrouve dans tous les encadrements métalliques des stations de métro mais également dans d'autres réalisations du célèbre architecte. Ce vert qui reste caractéristique du vocabulaire ornemental inimitable, issu du registre végétal particulièrement suggestif, tout en restant résolument tourné vers l’abstrait.
Si les stations de métro ne comporte pas toute une marquise de verre comme celle de la porte dauphine, nombre d'entre elles ont nanmoins ces deux yeux qui voient rouge la nuit tombée, et qui rappellent également l'insecte volant.
Ah oui pour la petite histoire, savez vous pourquoi a t on donné ce nom à cette station ? Il suffit de se plonger dans les pages de la grande Histoire.....Il s'agit là du souvenir de la Dauphine Marie-Antoinette, lorsque que cette jeune demoiselle n'était pas encore reine de France....La situation géographique que cette station correspondant à l'emplacement qui est celui de l'ancien château de la Muette qu'elle habitait alors...de la marquise à la dauphine...il n'y a pas qu'un pas, il y a une station de métro...